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Apprendre à lire
En 1997, la Direction de l'Évaluation et de la Prospective de l'Éducation nationale mène une étude dont les résultats mettent en évidence, chez l’enfant, l’absence de maîtrise du code écrit et les difficultés pour comprendre le sens des écrits.
En 2002, les réformes du Ministre de gauche, Jack Lang, puis en 2003, celles du Ministre de droite, Luc Ferry, démontrent par le consensus dégagé, même si l’éducation est un des secteurs qui divisent le plus la gauche et la droite, la nécessité absolue de changement des méthodes d’apprentissage de la lecture.
Les principaux axes problématiques des méthodes d'apprentissage de la lecture se situent aux niveaux du mode de début de l'apprentissage et des contenus matériels.
On peut différencier quatre méthodes :
La méthode globale : elle a pour principale caractéristique de commencer l'apprentissage de la lecture par la phrase et, de surcroît, la phrase orale.
L'inconvénient majeur et le principal reproche inhérent à cette méthode sont l'absence du concept de règle, ce qui conduit les apprenants à deviner le code écrit au moment de la lecture, alors que ceux-ci sont dans l'ignorance du principe de fonctionnement de la phrase aussi bien orale qu'écrite.
La méthode mixte : ou semi-globale a pour principe de commencer l’apprentissage par le mot entier. Au demeurant, à l'instar de la méthode globale, la méthode mixte procède de l'oral vers l'écrit et expose aux mêmes risques de devinettes que celle-ci. Ce grave défaut a obligé certains auteurs à proposer l'incorporation, dans la pratique, des éléments qui sont de l'ordre de la méthode syllabique, à savoir la lettre et la syllabe.
Toutefois, cette perspective n'a guère changé la nature du problème soulevé ni apporté de solution nouvelle.
La méthode syllabique : sa particularité consiste à engager justement l'apprentissage de la lecture en partant de l'écrit, ou de la manière dont la langue française s'écrit aujourd'hui, et en allant des lettres à la phrase.
Elle n'échappe pas néanmoins aux faiblesses qui sont, entre autres, la tendance à présenter des lettres isolées et des syllabes artificielles, auxquelles l'on peut ajouter les mots entiers et qui sont sources de difficultés pour les apprenants.
La méthode phonétique : elle a pour spécificité d'entreprendre l'apprentissage de la lecture à partir de l'oral et, plus exactement, des sons auxquels sont associées les lettres et les séquences de lettres de l'alphabet actuel.
Tout se passe alors comme si les apprenants avaient notamment une connaissance discriminatoire des éléments du système phonétique de la langue et comme si celle-ci avait été transcrite phonétiquement.
Les difficultés que comporte la méthode phonétique sont proches de celles qui sont inhérentes à la méthode globale et à la méthode mixte.
Ces quatre méthodes correspondent, à peu de chose près, à quatre catégories d'unités linguistiques qui sont la phrase, le mot, la syllabe et la lettre (dont l'équivalent phonétique est son).
Les unes partent de l'oral et donc du code sonore (où les apprenants ne savent pas ni ne voient pas) et, les autres, de l'écrit et conséquemment du code écrit (où les apprenants ne savent pas mais voient) ; dans le premier cas, le point de départ est l'auditif, qui n'est pas connu des apprenants (ce qui est source de grandes difficultés pour l'apprentissage) et, dans le dernier, le visuel (ce qui réduit les difficultés de l'apprentissage).
Un point positif néanmoins à mettre à l'actif de la méthode globale et de la méthode mixte est l'attention portée au sens comme moyen facilitateur ; dans le même registre, à l'inverse de leurs concurrentes, la méthode syllabique met au coeur de sa démarche le code écrit et la méthode phonétique, le son. En utilisant ces quatre dimensions d'apprentissage de la lecture, il est possible d'intégrer à la fois la phrase, le mot, le sens, la syllabe et la lettre (son).
Les difficultés des méthodes de lecture sont révélatrices de celles de l'ensemble du système éducatif qui entraînent des réformes à répétition souvent contestées dès leur annonce et donnant des résultats en demi-teinte.
Ainsi, le projet de réformes engagé par Luc Ferry a recueilli des objections dès le jour même de son communiqué.
Les contenus des enseignements dispensés dans le système d'éducation doivent découler de la vision de la science et de celle de la société qui en résulte. Faute de procéder de cette façon logique, les projets de réformes, quels qu'ils soient, se vouent aux oppositions malgré des éléments tout à fait intéressants qu'ils peuvent renfermer par ailleurs.
Les "nouveaux programmes" préconisent pour l'entrée dans la lecture, non pas de faire "acquérir globalement" (méthode globale et méthode mixte) ni de procéder des sons aux lettres (méthode phonétique), mais de faire apprendre à "nommer les lettres de l'alphabet" et à reconnaître les syllabes des mots et ainsi de familiariser les enfants avec la "découverte du fonctionnement du code écrit".
En situant la prévention de l'illettrisme au début de l'apprentissage de la lecture et en prônant une approche et un contenu pédagogiques nouveaux, le Ministère de l'Éducation nationale a rendu implicitement responsables des difficultés actuelles et a rejeté, sans le dire ouvertement, les méthodes de lecture en usage aujourd'hui. Dans ce domaine sujet à fortes controverses, où les recherches semblent dans l'impasse et les positions figées, sa décision a été de rejeter les unes (la méthode globale) et d'ignorer les autres (la méthode mixte et la méthode phonétique voire la méthode syllabique) !
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